L’Internet of things (IOT), ou encore Internet des objets (IDE) est un domaine qui connaît depuis quelques années une croissance constante et exponentielle. Fin 2020, on comptait déjà 11,7 milliards d’objets connectés dans le monde, et les prévisions sont de 30.9 milliards pour 2025 selon IOT Analytics. Pourtant, on peine encore à fixer une définition de l’IOT.
Une définition de l’IOT pas si simple
Le terme IOT a été popularisé dans les milieux universitaires et industriels par Kevin Ashton, l’un des inventeurs de l’étiquette radiofréquence (RFID), lors d’une conférence donnée en 1999. L’engouement réel pour l’Internet des objets décolle réellement dans les années 2010. Pourtant, dès le début, la définition de ce concept fait débat. Certains se concentrent sur les usages et les fonctionnalités de l’IOT, tandis que d’autres le définissent par la technologie. Et même en termes de technique, tous les acteurs ne s’accordent pas ! En 2010, Mathieu Weill et Mohsen Souiss soulignent à titre d’exemple le “fossé” entre la branche de standardisation EPCglobal du secteur de la logistique, pour laquelle les solutions RFID constituent le socle de l’IOT et la vision de l’IPSO Alliance, pour qui “si un objet ne parle pas le protocole IP, il n’a pas sa place dans l’Internet des objets”.
Du monde réel au monde virtuel
En 2012, l’Union internationale des communications approuve la définition suivante : l’IOT, ou Internet des objets, serait “une infrastructure mondiale pour la société de l’information, qui permet de disposer de services évolués en interconnectant des objets (physiques ou virtuels) grâce aux technologies de l’information et de la communication interopérables existantes ou en évolution”.
La définition de l’IOT reste néanmoins mouvante, et chercheurs comme professionnels du domaine s’essaient régulièrement à apporter la définition qui leur semble le plus juste. Heureusement pour cet article, tout le monde semble aujourd’hui s’accorder sur certains points clefs. L’IOT est une infrastructure qui permet de rendre des objets “intelligents”, créant une passerelle entre monde physique et monde virtuel. Il s’agit d’attribuer une identité virtuelle à des objets physiques et de les interconnecter entre eux et avec des espaces virtuels. Ces objets sont capables d’échanger des informations, des données, avec un réseau qui va permettre de les traiter. Dans certains cas, les relations peuvent se réduire à une interaction “machine to machine”, dans laquelle l’humain n’est plus nécessaire.
Comment ça fonctionne ? Une définition de l’IOT par la technique
Globalement, le fonctionnement de l’IOT est le suivant : collecte de données via des capteurs, envoi des données via une connexion, analyse et traitement de ces données, et enfin délivrance des informations à l’utilisateur, qui peut potentiellement lui-même agir sur ces données.
L’IOT est une infrastructure basée sur le croisement de technologies préexistantes, à tel point que certains chercheurs ont parfois postulé qu’il s’agissait d’un simple terme marketing. Il est sans doute vrai que le monde du marketing s’est parfois emparé de l’engouement autour de ce terme pour faire entrer dans la catégorie de l’IOT des objets connectés qui ne répondent pas forcément à tous les critères de la définition. Pourtant, l’IOT est aussi une appellation qui correspond bien à une évolution majeure de l’infrastructure Internet.
L’IOT, nouvelle phase du développement d’Internet
Pour expliciter cela, le chercheur Suisse Elgar Fleisch pose le fait que l’IOT serait en fait la troisième phase du développement d’Internet. Pour lui, dans sa toute première phase, Internet a permis une diffusion de données et d’informations par des entreprises, ou certaines structures, vers des utilisateurs et clients. Dans sa seconde phase, Internet s’est ouvert à la création de contenu directement par les utilisateurs. Déjà, Internet avait ainsi fait évoluer notre façon d’interagir.
À la suite de ces deux étapes, l’IOT ouvre une nouvelle dimension pour Internet : celle des objets. Au-delà des humains, les objets, les lieux, sont désormais capables de générer et transmettre des données automatiquement. Ce sont aussi de nouvelles informations, une nouvelle façon de percevoir le monde dont n’aurait pas forcément été capable un être humain.
L’IOT, bouleversement sociétal
Au-delà de l’aspect purement technologique, certains chercheurs cherchent donc aussi à définir l’IOT à travers une focale sociale. La fondation Telecom, en 2011, parle ainsi d’un “Internet des objets porté par une vision transformatrice, qui change la relation des objets entre eux et avec les humains, et qui étend nos outils, nos sens et notre conscience à travers ces réseaux d’objets, comme l’Internet lui-même a étendu notre cognition”.
De la même façon, pour les chercheurs Tiago SALGADO et Polyana INÁCIO, l’IOT a le pouvoir d’influer sur les actions des êtres humains et entre êtres humains. Ils soulignent en effet le fait que les êtres humains vont tenir compte de la connexion et de cette nouvelle “intelligence” des objets pour interagir les uns avec les autres. Les objets, connectés ou non, ont un aspect social non négligeable. Le fait qu’ils soient désormais reliés à l’Internet des objets influe forcément sur notre société et sur nos façons d’agir. Par exemple, si un lampadaire connecté permet de mieux appréhender les données sur la qualité de l’air, les politiques locales en matière de prévention de la pollution peuvent évoluer différemment.
Un Internet des objets qui se généralise
Autrement dit, l’IOT, c’est aussi une évolution de notre connaissance du monde dans de nombreux aspects. Dans leurs travaux sur l’application de l’IOT au domaine de la Défense, Christian Cosquer et Julie Lanckriet l’affirment ainsi : “de manière plus générale, on peut considérer l’IdO comme une technologie du savoir, qui donne à l’utilisateur la connaissance de l’environnement interne et externe des systèmes, équipements et personnes connectées.”
Il est frappant de voir que l’IOT touche à un très grand nombre, si ce n’est à tous les domaines de la vie. Prévention santé, autonomisation des personnes âgées, analyse de la pollution dans les villes, transports, agriculture… D’un meilleur brossage de dents à l’organisation de la défense d’un pays, les innovations IOT se sont immiscées dans le quotidien comme dans les institutions ou le monde du travail. C’est donc bien dans l’ensemble de la société que le bouleversement de nos façons d’agir opère désormais en réaction à ce nouvel afflux d’informations.
« Définition de l’IOT » : nos sources
– L’Internet des objets, quels enjeux pour l’Europe ? Pierre-Jean Benghozi, Sylvain Bureau, Françoise Massit Folléa (2012)
– Internet of Things Global Standards Initiative (2012)
– What is the Internet of Things? An Economic Perspective, Elgar Fleisch (2007)
– State of the IoT 2020: 12 billion IoT connections, surpassing non-IoT for the first time, IOT Analytics (2020)
– L’Internet des objets, objets de l’Internet, fondation Telecom (2011)
– Les objets connectés et la Défense, Christian Cosquer, Julie Lanckriet (2016)
– L’Internet des objets, concept ou réalité ? Mathieu Weill, Mohsen Souissi (2010)
– Les actions sociotechniques des objets connectés, des réflexions à partir de l’Internet des objets,Tiago SALGADO et Polyana INÁCIO (2017)